OpenBoard est un logiciel libre de tableau blanc interactif, gratuit et multiplateforme, fonctionnant aussi avec des projecteurs interactifs ou tout autre dispositif de même nature. Il obéit à deux principes : se centrer sur le travail de l’enseignant dans sa classe, et privilégier la simplicité d’utilisation.
Les aléas d’un logiciel devenu libre
Suisse – Afrique – France – Suisse. Un logiciel de tableau blanc interactif fut développé en 2003 à l’Université de Lausanne en Suisse, sous le nom d’Uniboard, puis transféré à un incubateur d’entreprises (Mnemis SA). Il fut acheté par le Groupement d’Intérêt Public pour l’Éducation Numérique en Afrique (GIP ENA) et transformé en logiciel libre sous le nom d’Open-Sankoré. Source : Wikipédia.
10 ans plus tard, le développement d’Open-Sankoré s’essouffla en France et la Suisse créa un embranchement (fork) sous le nom d’OpenBoard. « Actuellement, OpenBoard est maintenu par le département de l’instruction publique (DIP) de l’État de Genève. L’Université de Lausanne, à l’origine de la première version d’Uniboard en 2003 a récemment rejoint le projet via une aide logistique et financière. », peut-on lire sur le site d’OpenBoard.
Fonctionnalités d’OpenBoard
Les fonctionnalités d’OpenBoard, décrites dans le manuel de la version 1.3, sont restreintes par rapport à celles d’Open-Sankoré. Une rapide comparaison relève l’absence d’une demi-douzaine de fonctionnalités (cf. l’échange sur Twitter).
OpenBoard est cependant assez complet et utile :
L’histoire OpenOffice – LibreOffice se répétera-t-elle?
En matière de suite bureautique libre, on sait que The Document Foundation avait repris le code source d’OpenOffice, au moment où le contrôle passait de Sun Microsystems à Oracle, pour lancer le fork LibreOffice. Depuis Oracle a donné OpenOffice à Apache qui semble maintenant enclin à arrêter son développement, reconnaissant que LibreOffice occupe bien la place.
En matière de logiciel de tableau blanc interactif, Open-Sankoré a finalement jeté l’éponge. Et les ressources éducatives de Planète Sankoré ne sont plus disponibles.
Un message aux gouvernements
Un bureau du gouvernement du Québec et une commission scolaire avaient lancé une étude de conformité aux normes sur le logiciel Open-Sankoré, concluant qu’il était souhaitable d’adapter ce logiciel. Cela n’a pas été fait.
Combien plus inspiré et plus utile aurait été un coup de pouce à l’équipe de développeurs français. Pendant que cette étude se faisait, le projet mourait lentement.
C’est un archétype de mauvaise approche du logiciel libre : on fait un état des lieux, on dépense des centaines de milliers de dollars dans des études, des relevés d’utilisation, au lieu d’en dépenser dix fois moins de manière cent fois plus utile en participant activement au projet libre lui-même.
Le sort de RyXéo
Cette attitude de contempler le logiciel libre de l’extérieur en se posant des questions de consommateurs, au lieu de participer à son développement ou d’acheter les services et le support qui feront vivre la communauté, est assez générale. Bien des gouvernements et des établissements d’enseignement supérieur profitent des licences gratuites (nul ne saurait les en blâmer), mais « oublient » de faire leur part pour la survie du projet.
Ainsi, après 13 ans de bons et loyaux services, l’entreprise du libre RyXéo doit fermer boutique, Confrontées à des coupes budgétaires, les collectivités locales et les universités françaises n’ont pris aucun contrat de service et de support, se contentant d’utiliser le logiciel. Contraints au bénévolat, les développeurs et graphistes de RyXéo, ont dû mettre un terme à leur entreprise de service.
Il en va de même de Gallery, un projet libre pour archiver, classer et partager ses photos, qui après 14 ans de travail, entre en hibernation et cherche qui voudrait continuer ce beau projet.
Cela ressemble au sort d’Open-Sankoré; il s’agit là d’un paradigme qui doit changer. Le responsable de RyXéo le dit, en ses mots : «l’amalgame libre = gratuit, est un SSLL killer ! [SSLL : Société de service en logiciel libre]». Ce qui est en cause, ce n’est pas la gratuité des licences, c’est que les établissements détournent leur regard des conditions nécessaires à la production du logiciel libre.
En conclusion
Le monde du libre a du ressort et, grâce à la publication du code source, un projet comme Open-Sankoré ne peut pas si facilement mourir : il permet des embranchements (forks). La nécessaire collaboration inter-établissements semble bien amorcée entre les universités suisses romandes pour assurer la survie d’OpenBoard.
Il serait avisé de comprendre ce qui fait vivre un logiciel libre et, par exemple, de donner 5 % des économies de licence réalisées à la communauté qui le développe et en assure la maintenance. Ou bien de reconnaître dans la charge de travail de ses analystes le temps consacré à participer au développement du logiciel libre utilisé. Qui le fait? Qui ne le fait pas?
Pierre Cohen-Bacrie
Conseiller pédagogique TIC
Collège Montmorency
@captic
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